BENDA (Julien)

La Trahison des clercs. Paris, Bernard Grasset, 1927. Petit in-4, broché, sous étui de demi-chagrin tabac. Édition originale. Un des 8 premiers exemplaires réimposés sur Montval sous double couverture (n° 4). Des intellectuels fourvoyés. Dans ce pamphlet écrit avec feu, Julien Benda distingue les "laïcs", engagés dans la gestion des affaires temporelles, des "clercs", ces intellectuels chargés de la défense des principes et valeurs intemporels. Or, les clercs ont trahi: depuis un demi-siècle, ils se sont fourvoyés dans les affaires séculières et ont abandonné le temple des idées dont ils avaient la charge. Cette trahison ne relève pas de l'engagement public - Benda glorifie ainsi l'attitude de Voltaire dans l'affaire Calas ou celle de Zola dans l'affaire Dreyfus - mais de la subordination de l'intelligence à des partis politiques ou des intérêts prosaïques. "Les hommes dont la fonction est de défendre les valeurs éternelles et désintéressées comme la Justice et la Raison, et que j'appelle les clercs, ont trahi cette fonction au profit d'intérêts pratiques"... "Jusqu'à nos jours, la Trahison des clercs est resté un livre emblématique, discutable, discuté parfois avec véhémence, mais un objet de référence obligé dans toute réflexion et dans toute histoire concernant le rôle des intellectuels dans la Cité. (...) Le livre de Benda est prophétique aux deux sens du mot, dénonciateur et annonciateur. Il dénonçait l'intelligence qui donnait les justifications savantes et littéraires au déchaînement des passions particulières - pléonasme didactique; il annonçait ce que deviendraient les sociétés qui annuleraient tout pouvoir spirituel indépendant; des régimes totalitaires" (Michel Winock, Le Siècle des intellectuels, pp. 195; 202). Exemplaire parfait, tel que paru. (Printing and the Mind of Man, nº 419: "Undoubtedly one of the major events in political thought between the two wars. (...) The title of Benda's manifesto became a kind of a catch phrase which, by a curious irony