Joris-Karl HUYSMANS.

Lot 46
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Joris-Karl HUYSMANS.
En route. Paris, Tresse & Stock, 1895. In-12: maroquin rouge janséniste, dos à nerfs, doublures de maroquin vert serties d'un filet doré, garde de moire verte, couverture conservée, tranches dorées sur témoins, étui (Conti-Septier). Édition originale. Un des 50 exemplaires sur hollande Van Gelder Zonen (nº 50). Le roman retrace la "conversion" de Huysmans, à peine caché derrière son héros Durtal. Paul Valéry écrivit à l'auteur: "Vous précipitez le roman actuel à la chaudière des enfers de foire, où est sa place - et vous bâtissez quelque chose enfin qui fait resonger aux grandes fontes littéraires - quelque chose de rude et de mûr avec un énorme courant en dessous, monotone, et dont on pouvait juger incapable une époque de petits morceaux, de globules et de piqûres." Exemplaire parfait auquel on joint trois remarquables lettres autographes signées adressées à son ami Adolphe Berthet. Écrivain lyonnais, Adolphe Berthet alias Joseph Esquirol (1868-1920) était un proche et disciple de Huysmans. Ces trois lettres, de 4 pages in-16 chacune, adressées entre le 23 février 1900 et le 25 août 1904, sont savoureuses: Huysmans y parle d'hérésie, notamment de l'abbé Boulan (le modèle du chanoine Docre), de la vie monastique, de ses ouvrages, de son appartement misérable de la rue Monsieur et de son dégoût de Lourdes et de ses "bondieuseries hideuses".. La première est adressée du monastère de Ligugé. "Je n'ai guère le temps [...] de vous aiguiller d' épistoles, mais votre découverte me met en joie. Ne vous arrêtez pas là, suivez la piste, qui vous conduira, sûrement, à de plus curieux louffoques. Soyez sûr de ceci: aucune hérésie, si vieille soit-elle, n'est perdue. De par un coin de France, il existe une personne au moins qui la pratique et la repasse à une autre. Et Lyon est une terre spéciale pour cette culture [...]. Les renseignements sur Boulan sont d'une exactitude douteuse. C' était beaucoup plus compliqué que cela. Et la maison dite de passe n'a jamais, à ma connaissance, existé chez lui. Les fornications y étaient surtout fluidiques. C' était le succubat et l' incubat. [...] Cultivez votre hérétique, et surtout le milieu où il évolue. Il serait bien étonnant que vous ne missiez pas la main sur des cénacles vraiment comiques. Bonne chance... [...]." La deuxième est adressée de Paris, le 24 mars 1902: son correspondant a vécu des moments difficiles. "Hélas! dire que cette incompréhensible et épouvantable loi du chagrin et de la douleur est inéluctable!" Sa bonne est alitée. "J'ai pour l'assister et me confectionner de laconiques repas, une guerrière que j'aimerais assez à voir dehors. [...] Cette maison de la rue Monsieur est infernale. Je n'y aurai pas vécu 2 jours gais. Tous les jours c'est un accident. Les planchers s'effondrent - on les refait - avant-hier le plafond crève et il pleut. Cette baraque tombe en ruines et je descendrai un de ces jours dans la cour. J'en ai! - si je ne me croyais pas très réellement obligé, ici, pour l'expiation de mes vieux péchés, à la pénitence je filerais sans tarder. [...] L'oblat marche à bien petits pas. Je suis déconcerté par la nécessité de dire la vérité sur les Bénédictins et de m'emballer pour en faire l' éloge. Ah! ce n'est plus la Trappe. Ces ronds de cuir pressés comme les appelait Le Cardonnel ne sont pas faciles à louanger. C'est mauvais pour un livre d'avoir trop vécu, comme je l'ai fait, dans ce monde-là et d'y croire encore, car ici je continue à Bénédictimiser dans les grands prix. Je n'ai pas lu les bouquins dont vous me parlez; au fait, je ne lis plus guère ce qui paraît. J'achète des tas de livres de renseignements et je suis si plongé dedans que je n'ai plus le temps de rien. N'ayez pas peur pour Stock, à moins que la saison ne soit par trop avancée, il vous fera paraître vite. [...] Il prépare une édition complète des oeuvres de Tolstoï!" (Sous le nom de Joseph Esquirol, Adolphe Berthet a publié en 1903 chez Stock Cherchons l' hérétique!) La dernière lettre est adressée avant le départ de Huysmans pour Lourdes: "Ça ne m'amuse guère car je n'ai pas la piété de cet endroit, mais enfin il faut que j'y aille pour une quinzaine au moins pour compléter mes notes. Vous comptez les tonneaux de vidange, dites-vous, au café, le soir. Mais à Lourdes, il n'y a même pas cette ressource!! Rien du tout, hors un décor de bondieuseries hideuses et une grotte gâtée par des foules. Le soir, c'est le pire, heureux quand les hurlements des pélerins ne vous empêchent pas de dormir! Ah! les beaux tonneaux qui charrient tous les péchés du corps! Mais c'est très suggestif, c'est la communion corporelle, plus sûre que celle des âmes. [...]" Il donne des nouvelles de certains - Hennezel, Stock, Descaves - et se désole de devoir quitter un Paris heureusement vide. "Voilà les nouvelles, cher ami, buvez frais et fientez chaud, pipez ferme et priez. [...]" Très bel ensemble.
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