François de CHATEAUBRIAND

Lettre autographe, 2 juillet 1816, à la duchesse de Duras; 3 pages et demie in-8 (un peu salie). Belle lettre politique. «Vous êtes bien bonne, chère soeur, de vous occuper des autres; la Veuve Quintal [veuve d'un des complices d'Armand de Chateaubriand] sera bien heureuse, mais c'est de vous qu'il faut parler. Votre lettre un peu moins triste, me donne quelque espérance, que les eaux finiront par vous faire du bien. Je maudis le temps qui continue à être déplorable. Toujours de la pluie; cela doit gâter beaucoup les eaux. Vous allez voir Madame [la duchesse d'Angoulême]. Nous, nous rentrons ici dans la plus profonde solitude. Les fêtes sont finies; tout ce qui restoit encore à Paris s'en va. Mais après ce temps de repos, nous rentrerons dans les orages. Le mois d'Octobre approche; les Chambres reviendront. Je ne vois pas que l'on prenne ici un système propre à ramener l'union. On laissera le temps s'écouler avec cette légèreté et cette insouciance qui nous caractérisent. Et puis quand on se verra près du dénouement on prendra quelque résolution précipitée qui aura les plus graves inconvénients. Je continue toujours mon travail [De la Monarchie selon la Charte]. J'espère faire un ouvrage utile; j'aurois bien voulu qu'on m'en eût épargné la façon, mais puisqu'on ne veut rien écouter, il faut encore faire un dernier effort pour avertir la France du danger. Ce qui m'encourage un peu, c'est que si j'ai eu quelque influence sur les destinées de Buonaparte, je puis espérer quelque succès contre des valets: les pygmées ne doivent pas être plus difficiles à renverser que le Géant. D'ailleurs ma destinée est de combattre. Faites votre devoir et laissez faire aux Dieux! Quand quittez-vous les eaux? quand nous revenez-vous? Je meurs d'envie de vous revoir. Cette pauvre Mouche [Natalie de Noailles], voilà comme elle est pour tout». (CG III 763)