Alexandre von HUMBOLDT

Lettre autographe signée, Berlin 19 février 1828, à la duchesse de Rauzan; 3 pages in-8. Belle lettre sur la mort de la duchesse de Duras (16 janvier 1828); la lettre est adressée à sa fille cadette Clara. Il trace ces lignes dans la plus vive affliction: «Vous parler de ce qui vous est ravi, de celle qui faisoit le plus bel ornement de la France, dont la bienveillance de caractère égaloit pour le moins l'élévation du plus noble talent, ce n'est pas vous rappeler la douleur dans une calamité si grande c'est un besoin de l'ame de s'occuper sans cesse de qui a fait le bonheur de notre vie. [...] Qu'on est mal préparé à ces coups de la destinée. Je n'ai jamais été bercé d'un vain espoir; une telle vie sembloit un triste fardeau. Le contraste de cette haute intelligence et de tant de foiblesse physique étoit si affligeant et cependant quand le cruel moment arrive, on n'est préparé à rien, c'est comme un malheur inattendu». Il avait appris «combien il restoit peu d'espoir. Le Roi de Prusse les Princes ont été sans cesse occupés de ce danger, la sensation a été générale dans toute l'Allemagne: grand peintre des douleurs humaines elle s'étoit peinte elle-même: on croyoit la connoître en lisant ses ouvrages. La bonté de son ame se répandoit comme une douce vapeur sur tout ce qu'elle touchoit... Vous me devriez quelques pages sur les derniers momens d'une existence liée à tant de grands et beaux souvenirs. Vous dites si bien ce que vous sentez dans la profondeur de votre ame et cette occupation même vous soulageroit. [...] Je vous parlerai de ma position, lorsque je serai moins agité par la douleur d'une telle perte. Vous savez ce que je lui devois de reconnoissance; combien dans tous les momens de la vie, elle fut indulgente pour moi, comme elle jouissoit du moindre de mes succès... Je serois le dernier des hommes si je ne lui conservois un culte dans mon coeur»..