BERNANOS (Georges)

La Grande Peur des bien-pensants. Edouard Drumont. Paris, Bernard Grasset, 1931. Grand in-8: maroquin janséniste rouge vif, doublures et gardes de box mastic, non rogné, tranches dorées sur témoins, couverture et dos conservés, étui (A. & R. Maylander). Édition originale. Un des 31 exemplaires réimposés au format in-quarto sur vélin d'Arches. Un pavé dans le marigot des années trente. Pamphlet inaugural de Georges Bernanos (1888-1948), l'ouvrage était à l'origine intitulé: Démission de la France. Le brûlot constituait un violent réquisitoire contre l'époque - la Troisième République et ses politiques, la bourgeoisie bien-pensante et l'argent-roi. L'auteur y rendait un hommage appuyé à Edouard Drumont, mais il ne ménageait pour autant pas le patriotisme fourvoyé qui avait transformé l'amour de la nation en humiliation du peuple allemand, hypothéquant l'avenir. Ce pavé jeté à la face de l'époque signait l'avènement de l'intellectuel Bernanos sur la scène française. Écrit de combat, il éloignait son auteur de l'Action française, distance qui ne cessa de grandir par la suite. Ecoeuré par l'absence de tout réaction face à la montée des totalitarismes, il devait rompre définitivement avec ses enthousiasmes de jeunesse: en 1938, bouleversé par la guerre d'Espagne, il publia en 1938 les Grands Cimetières sous la lune qui constituaient une dénonciation définitive du fascisme. Farouchement attaché à sa liberté de penser, Georges Bernanos fit, jusqu'à sa mort, cavalier seul. Quant à la question de l'antisémitisme de l'écrivain, qui fait toujours débat, Élie Wiesel a plaidé sa cause. Bernanos est un écrivain "qui eut le courage de s'opposer au fascisme, de dénoncer l'antisémitisme et de dire justement ce qu'il a dit et écrit de la beauté d'être juif, de l'honneur d'être juif, et du devoir de rester juif." Il ajoute: "J'admire beaucoup Bernanos, l'écrivain. (...) C'est l'antisémitisme qui m'a gêné au départ chez lui, ainsi que son amitié pour Édouard Drumont bien entendu. Mais u