François de CHATEAUBRIAND

2 Lettres autographes, [Londres] 28 et 31 mai 1822, à la duchesse de Duras; 4 pages et quart et 5 pages in-4. Belles Lettres sur une soirée artistique à l'ambassade, et sur la politique. Mardi 28 mai 1822. Il est révolté par le «mensonge éternel» de son amie. «Je n'ai de ma vie écrit d'aussi longues et d'aussi fréquentes Lettres qu'à vous. Je n'ai pas manqué encore un seul courrier depuis que je suis ici. [...] Je ne vois plus ce que j'ai à faire dans ce pays; toutes mes conquêtes sont faites. J'ai donné avant-hier mon grand dîner (il étoit superbe) au duc d'York. Reste le Roi, mais il y a toujours du doute, parce qu'il n'est pas encore sorti de chez lui comme Roi, et que la nécessité de visiter tout le corps diplomatique s'il vient chez moi, est dure et peut l'arrêter. Je me suis plus établi dans deux mois que tous mes prédécesseurs en 7 ans. Me voilà donc fort content, mais enfin je sens que mon intérêt s'affoiblit, et maintenant il faudra que je fasse beaucoup d'efforts sur moi pour aller jusqu'au bout. J'irai pourtant. Nous touchons à un grand moment. La décision de la guerre ou de la paix et l'ouverture de nos chambres. Il y a quelque bruit de paix et malgré toutes menaces je crois que la session sera courte et la majorité ministérielle assurée et forte». Il conte la «soirée d'artistes» qu'il a donnée la veille, «où se trouvaient Horace et Carle Vernet, Mde Catalani, Mlle Leverd, Lafont et sa femme, Moschelès. C'étoit une soirée de garçon. Je n'avois que les ambassadeurs d'Autriche, de Prusse et de Naples. Jamais il ne s'est trouvé tant de talents divers réunis. Mlle Leverd a déclamé des scènes du Misanthrope et de Tartuffe. Mde Catalani a chanté. Lafont et Moschelès ont joué du violon et du piano. Si nous avions eu des crayons nous aurions fait dessiner les Vernet. Vous savez comme ceux-ci sont mauvais d'opinion. J'avais toujours peur qu'ils ne se prissent de querelle avec Mlle Leverd qui est une enragée Royaliste. Tout s'est passé à merveilles et les Vernet q